- La gestion de l’eau – considérée comme partie du patrimoine commun de la nation en France – implique de nombreux acteurs publics et privés. Les usages de l’eau sont réglementés et encadrés aux échelles nationale, locale, privée et même européenne.
- Dans un contexte de raréfaction et de dégradation des ressources en eau, la maîtrise des usages et les enjeux de gouvernance sont au cœur des politiques publiques, de l’action territoriale et des préoccupations citoyennes.
« L’eau fait partie du patrimoine commun de la nation. Sa protection, sa mise en valeur et le développement de la ressource utilisable, dans le respect des équilibres naturels, sont d’intérêt général. »
Article L210-1 du Code de l’environnement
Version en vigueur depuis le 24 décembre 2022
Modifié par Ordonnance n°2022-1611 du 22 décembre 2022 – art. 3
Panorama des acteurs de l’eau
La gestion de l’eau en France concerne de nombreux acteurs et usagers répartis dans un ensemble d’activités de gestion et d’exploitation des ressources en eau, et des milieux aquatiques et littoraux, à savoir :
- Les administrations et organismes publics,
- Les bureaux d’étude et de maîtrise d’œuvre,
- Les entreprises de travaux publics,
- Les services publics d’adduction en eau potable, d’exploitation des systèmes d’assainissement et de gestion des eaux pluviales,
- Les établissements publics de gestion des ressources en eau et des milieux aquatiques,
- Les industriels,
- Les irrigants,
- Les gestionnaires des canaux et voies navigables,
- Les acteurs économiques, chambres consulaires et fédérations professionnelles,
- Les associations.
Le Comité national de l’eau constitue l’instance nationale de consultation sur la politique de l’eau. Il est consulté sur les grandes orientations de la politique de l’eau, sur les projets d’aménagement et de répartition des eaux ayant un caractère national ou régional, ainsi que sur l’élaboration de la législation ou de la réglementation en matière d’eau.

Les acteurs de l’eau en France – Source : juridiction fiscale
Au niveau des grands bassins hydrographiques

Le territoire métropolitain est divisé en 6 grands bassins hydrographiques. Chaque bassin est doté d’un Comité de bassin, d’une Agence de l’eau et d’un préfet coordonnateur de bassin. Fondées en 1964, les Agences de l’eau perçoivent des redevances auprès des usagers. Ces fonds sont ensuite redistribués sous forme d’aides financières (prêts, subventions) aux collectivités locales, aux industriels et aux agriculteurs pour financer la gestion du grand et du petit cycle de l’eau.
Les Agences de l’Eau collectent les redevances et contribuent au financement de la préservation des ressources en eau auprès des acteurs publics et privés sur la base du principe « celui qui pollue paie, celui qui dépollue est aidé ».
Parlements de l’eau, les Comités de bassin regroupent des représentants des services de l’État, des collectivités territoriales et des usagers professionnels et non professionnels. Les Comités de bassin évaluent l’état des lieux des ressources en eau et des milieux aquatiques, et élaborent des Schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE), outils de planification pluriannuelle. Ils participent à l’élaboration des décisions financières des Agences de l’eau.

Les SDAGE sont des documents à valeur juridique, ils sont opposables à l’État, aux collectivités territoriales et aux établissements publics. Les Comités de bassin sont consultés sur l’opportunité des actions significatives d’intérêt commun et sur toutes les questions relatives à la gestion de l’eau et des milieux aquatiques.
Au niveau des bassins versants
Localement, l’eau est gérée à l’échelle des bassins versants, unités hydrographiques ou hydrogéologiques cohérentes. Communes, départements et régions ont ainsi chacun un rôle spécifique à jouer dans une gestion de l’eau intégrée à l’aménagement du territoire. Les Établissements publics d’aménagement et de gestion de l’eau (EPAGE) et les Établissements publics territoriaux de bassin (EPTB) sont des syndicats mixtes bénéficiant d’un statut particulier au regard de leur périmètre d’intervention et des missions spécifiques qu’ils exercent.
Ils animent les Commissions locales de l’eau (CLE), élaborent et pilotent les Schémas d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE). Les CLE regroupent services de l’État, collectivités territoriales, acteurs économiques et non économiques.
Les SAGE sont des documents d’orientation et de gestion de l’eau adaptés aux contextes et enjeux locaux, en déclinaison des SDAGE. Approuvés par les préfets de département, les SAGE ont une portée juridique : ils sont opposables aux tiers et à l’administration. Les autorisations administratives, documents de planification, d’aménagement du territoire et d’urbanisme, doivent être compatibles avec le règlement du SAGE.
À l’échelle intercommunale et communale
-
Les acteurs du grand cycle de l’eau ou cycle naturel de l’eau
La gestion du grand cycle de l’eau regroupe la Gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (GEMAPI), la gestion des ressources souterraines et la gestion du littoral et de la mer.
L’État assure la gestion du domaine public fluvial et des cours d’eau domaniaux et l’exploitation des ouvrages hydrauliques associés (barrages, canaux, digues). Les autres hydrosystèmes (nappes souterraines, cours d’eau, lacs naturels et artificiels, zones humides) et ouvrages hydrauliques associés sont gérés par les collectivités territoriales et les propriétaires privés.
Les politiques publiques de gestion des ressources en eau et des milieux aquatiques associent les usagers économiques – agriculteurs, industriels, touristiques – et non économiques – fédérations de pêche et associations de protection de la nature – à travers différents outils contractuels : contrats de rivière, plans de gestion des espaces naturels, dispositifs de protection des captages, etc.
Depuis 2018, la compétence GEMAPI est exercée au niveau intercommunal, soit en direct, soit en s’appuyant sur des syndicats de rivière ou EPAGE. En France, l’entretien des cours d’eau non domaniaux est de la responsabilité des propriétaires privés.
-
Les acteurs du petit cycle de l’eau ou cycle anthropique de l’eau
Les collectivités territoriales sont chargées de l’adduction en eau potable et du traitement des eaux usées. Pilotés par des élus locaux, ces Services publics industriels et commerciaux (SPIC) peuvent être exercés en régie directe ou en délégation auprès d’un opérateur privé. En vertu du principe « l’eau paie l’eau », ces services ont un budget annexe indépendant du budget général des collectivités.
Historiquement déployé à l’échelle des communes, pour la plupart regroupées en syndicats intercommunaux, l’assainissement collectif concerne 85 % des abonnés. Les 15 % restants, situés en zones rurales, utilisent des systèmes d’assainissement non collectifs dont ils ont la charge et contrôlés par les Services publics d’assainissement non collectif (SPANC).
Sur leur territoire, les services en charge de l’assainissement gèrent tout ou partie des effluents non domestiques générés par les activités industrielles, avec un règlement spécifique définissant les seuils de rejet et des conventions de déversement.
-
La gestion des eaux pluviales
En lien direct avec la gestion de la voirie, la gestion des eaux pluviales est partagée entre les collectivités territoriales, les exploitants d’infrastructures (autoroutes, Installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), zones d’activités) et les propriétaires privés (Art. 641 du Code civil).
La gestion des eaux de ruissellement est en lien direct avec la protection contre les inondations, l’aménagement du territoire et l’urbanisme, les déversements d’eaux usées par temps de pluie et les pollutions diffuses des sols et milieux aquatiques.
Gouvernance et partage de l’eau
L’organisation de la gestion de l’eau en France est un modèle à l’échelle européenne et mondiale. Néanmoins, l’état de dégradation des ressources et la persistance de conflits liés au partage de l’eau montre que notre modèle est perfectible malgré l’existence d’instances de contrôle (OFB, DDT, etc.) ayant pouvoir de police.
Le cycle de l’eau est largement altéré par les activités humaines et le changement climatique. 33 % des masses d’eau superficielles (rivières et fleuves) et 29 % des masses d’eau souterraines ne respectent pas les normes de qualité environnementales fixées au niveau européen. Face à ces enjeux, la gouvernance de l’eau doit aujourd’hui intégrer de multiples dimensions : environnementale, économique, sociale et démocratique.
Sources :
- Agences de l’eau : https://www.lesagencesdeleau.fr/
- Cour des comptes : Cour des comptes, 2023. La gestion quantitative de l’eau en France.
- Rapport sur l’état des services publics 2024, section eau.
- Ministère de la Transition Écologique
- DESCOLLONGES, C, 2024. L’eau fake or not ?, Tana édition.
- PORCHER, S. La fin de l’eau. Fayard, 2024.
Image(s) :